Un nouveau médicament antalgique sans risque de dépendance

Aux USA, les décès liés à un surdosage de fentanyl, un médicament antalgique opioïde, sont devenus la première cause de mortalité chez les 18-45 ans. Ce chiffre témoigne de l’enjeu majeur de santé publique que représente le mésusage et la dépendance aux médicaments opioïdes. Des médicaments pourtant essentiels pour lutter contre la douleur. Dans ce contexte, un nouvel antalgique en cours de développement, le suzetrigine, présente l’avantage de n’entraîner aucune accoutumance ou dépendance. Mais est-il aussi efficace ?

La dépendance aux opioïdes, un enjeu majeur de santé publique

Face aux douleurs modérées à sévères, lorsque le paracétamol ou les antiinflammatoires non stéroïdiens (ibuprofène, aspirine) ne suffisent plus à soulager le patient, il faut recourir à des médicaments antalgiques plus puissants. La quasi-totalité de ces antalgiques sont des dérivés d’opiacés ou opioïdes.

Si les médicaments opioïdes sont très efficaces pour soulager les douleurs nociceptives (liées à un signal douloureux), ils sont associés à des effets secondaires parfois graves, mais aussi à un risque de mésusage et de dépendance. Leur prescription et leur délivrance sont encadrées pour limiter ce risque et permettre de soulager au mieux les douleurs du patient. Mais les situations de surdosage, de détournement et de dépendance ont tendance à persister, en particulier chez les patients atteints de douleurs chroniques.

Un nouvel antalgique, le suzetrigine

Les chercheurs et les médecins tentent de développer de nouveaux médicaments antalgiques, plus efficaces sur l’ensemble des douleurs et avec le moins d’effets secondaires possibles. Parmi les candidats les plus prometteurs, figure le suzetrigine. Ce médicament cible des canaux sodium particuliers (appelés les canaux NAV1.8), et bloque ainsi la transmission du signal douloureux jusqu’au cerveau. Dans les essais cliniques menés sur plus de 1 000 patients, le suzetrigine s’est montré aussi efficace que les médicaments opioïdes pour soulager les douleurs modérées à sévères, en entraînant moins d’effets secondaires. Ce médicament s’administre par voie orale et se présente sous la forme de comprimés dosés à 50 mg.

A la différence des médicaments opioïdes qui agissent directement au niveau cérébral, le suzetrigine agit localement, au niveau des zones où se produisent les signaux douloureux. Ainsi, ce nouveau médicament ne présente aucun risque d’accoutumance ni de dépendance. Toutefois, il faut noter que l’essai clinique portait sur des douleurs aiguës et qu’il reste à évaluer l’efficacité du suzetrigine pour soulager les douleurs chroniques, les douleurs les plus à risque d’entraîner une dépendance. 

Une prise en charge globale de la douleur

L’agence américaine du médicament, la FDA (Food and Drug Administration) a approuvé fin janvier 2025 le suzetrigine, qui devient le seul médicament antalgique non opioïde destiné à soulager les douleurs modérées à sévères de l’adulte. A ce jour, il n’est pas autorisé en Europe. Cette approbation aux USA est la première depuis plus de 20 ans pour un médicament antalgique non opioïde.

Si la mise sur le marché du suzetrigine constitue une étape importante dans le développement de médicaments antalgiques non opioïdes, il reste à déterminer la place de ce nouveau médicament dans les stratégies de prise en charge des patients douloureux, en particulier des patients douloureux chroniques. D’autres aspects restent essentiels pour garantir un meilleur usage des médicaments antalgiques :

• Une prise en charge pluridisciplinaire, globale et personnalisée de la douleur, incluant aussi les traitements non médicamenteux de la douleur ;
• La mise en œuvre de conditions de prescription et de délivrance limitant le risque de mésusage, comme les dernières mesures mises en place en France.